
Les amateurs du cuir marocain penseront directement à la tannerie de Fès, aussi connue sous le nom de tannerie Chouara, comme étant l’un des lieux emblématiques du savoir-faire artisanal marocain. Située au cœur de la médina, elle est considérée comme la plus grande et plus ancienne tannerie traditionnelle du pays, remontant au XIème siècle. Là bas, on y transforme la peau en cuir, étape indispensable avant la fabrication des articles de maroquinerie, de babouches ou encore de selles. L’originalité de ce lieu est qu’on y observe encore des techniques qui semblent venir d’un autre temps.
Le processus est resté pratiquement inchangé depuis des siècles. Les peaux brutes, issues principalement de moutons, de chèvres, de vaches et parfois de chameaux, sont d’abord trempées et nettoyées.
Première étape : l’arrivée des peaux
Encore lourdes, empreintes de l’odeur de la bête et marquées par le voyage, les travailleurs trient les peaux, les étalent et les secouent.
Le trempage
Les peaux sont plongées dans des cuves d’eau froide pour leur rendre de l’éclat, les ramollir et les débarrasser de la poussière. C’est la première respiration du cuir.
La chaux
Les peaux entrent dans les grandes cuves blanchâtres remplies de chaux et de cendres. Là, les poils se détachent et la peau s’allège de ce qui n’est plus utile. C’est une étape longue et fastidieuse pour les ouvriers armés de leurs outils à lame courbée ; ils raclent et nettoient avec vigueur pour lisser la matière et la nettoyer.
Le lavage
Lorsque la peau sort des cuves, elle est nue, sensible. Les travailleurs la rincent, la malaxent, la tournent dans l’eau pour l’apaiser, comme pour la consoler.
Le pigeon
Cette étape est souvent celle qui perdure dans la mémoire des visiteurs pour son caractère insolite. Après le décapage et le lavage, les peaux sont encore rigides. Pour les assouplir, les travailleurs utilisent une méthode ancestrale : les plonger dans des bassins contenant de la fiente de pigeon mélangée à de l’eau. Riche en ammoniaque naturelle, elle dissout les résidus de graisse et de protéines tout en rendant le cuir plus souple. Les ouvriers marchent pieds nus dans les bassinspour bien faire pénétrer le mélange. C’est un geste précis et physique mais crucial pour obtenir un cuir prêt à la teinture.
La teinture
Les bassins éclatent de rouge, de jaune, d’ocre, d’indigo. Des teintures naturelles obtenues grâce au safran, au henné, au pavot et à l’indigo et qui donnent à chaque peau sa personnalité. Les travailleurs plongent les peaux, les tirent, les replongent telle une chorégraphie.
Le séchage
Les peaux montent sur les murs de la médina, tendues comme de grandes ailes. Le soleil du Maroc fait le reste ; il fixe les couleurs et durcit certaines parties de la matière.
Et enfin, la finition
Les artisans découpent, polissent, nourrissent le cuir avec des huiles naturelles. Ils vérifient la souplesse, éliminent les défauts, et achèvent le travail de toute une chaîne humaine.
En revanche, l’odeur émanant du travail des peaux peut-être insoutenable, surtout pour les visiteurs qui s’aventurent dans la tannerie pour la première fois. Cette problématique n’est pas restée sans solution puisque les artisans veillent à déposer des bottes de menthe fraîche à chaque entrée afin que le visiteur puisse profiter pleinement du lieu sans trop de désagrément ; il suffit juste de maintenir les feuilles de menthe sous son nez pour maintenir l’odeur à distance et vous voilà près à rester autant de tant que vous le désirez à observer les cuirs de la tannerie de Chouara.

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